Le 6 aout est un jour très important en Bolivie; c’est le jour où se fête l’indépendance de la République plurinationale de Bolivie. A cette occasion nous vous proposons un bref retour dans le passé afin de comprendre dans quelles conditions est né ce pays et l’importance symbolique de ce jour.
Lors de la conquête espagnole, Francisco Pizarro envoya son frère Gonzalo Pizarro conquérir le Charcas ou Callao, l’actuelle Bolivie en 1538. Il fallut près de 60 ans pour conquérir tout le territoire.
En 1561 s’installe dans la ville de l’argent (de la Plata, actuelle Sucre) l’audience Royale de Charcas, l’autorité juridique suprême du Haut Pérou.
Le but est de créer un nouveau centre administratif régional pour contrôler cette zone prolifique en argent.
C’est ainsi que l’impérialisme espagnol prend place dans cette partie d’Amérique, attirée par les grands gisements d’or et d’argent qui feront de ce pays une nation nettement minière.
Les nouvelles villes, créées par les conquistadores, se virent dotées d’assemblées, de fonctionnaires de justice, de maires et, bien sur, d’autorités militaires.
Cette autorité imposée par la force et qui abuse de son pouvoir, dictant sa culture et sa religion, exploitant le peuple, réveilla un sentiment de haine et de rancœur envers le pouvoir espagnol. Toutes les mesures répressives des espagnols furent le terreau de multiples rébellions et soulèvements dès 1780, qui commencèrent à inquiéter le pouvoir du Pérou et d’audience du Charcas.
Une des rébellions les plus dramatiques fut celle de Túpac Catari, qui assiégea la ville de La Paz pendant 109 jours. Ce mouvement indigène fut violement réprimé et ses initiateurs furent tous exécutés le 13 novembre 1781.
Les idées d’indépendance, impulsées par la révolution française (1789), l’indépendance des Etats-Unis (1776) et l’invasion de l’Espagne par Napoléon Bonaparte en 1808, germent également dans les esprits sud américains.
Les premiers soulèvements eurent lieu en 1809 à Chuquisaca et à La Paz, alors partie du vice royaume du Rio de la Plata.
En 1809, un groupe de révolutionnaires de La Paz, sous le commandement de Pedro Domingo Murillo, proclame une première fois l’indépendance du Haut Pérou envers l’impérialisme Espagnol.
Un an après Buenos aires, capitale du vice royaume du Rio de la Plata, se déclare indépendante de la couronne et d’autres villes du haut Pérou suivent.
L’argentine s’unit au haut Pérou pour combattre les royalistes dans le nord les mettant en déroute dans la bataille de Suipacha le 7 novembre 1810. A ce même moment, depuis le Pérou le général Goyeneche avec les forces militaires royalistes déroute les troupes argentines dans la bataille de Guaqui, le 20 juin 1811.
Les affrontements militaires et guérilleros durèrent ainsi jusqu’en 1816, se succédant évènements sanglants après évènements sanglants.
Comme les espagnols avaient le dessus et paralysaient les activités guerrières dans le Haut Pérou, le général José de San Martín, depuis l’argentine organisa une grande armée et alla libérer le Chili, le 12 février 1818.
C’est à partir du Chili que, en 1820, se met en place une grande campagne militaire pour libérer le Haut Pérou par la mer. L’armée de San Martin, après multiples batailles fit son entrée triomphale dans la capitale péruvienne le 12 juillet 1821.
Il convoqua immédiatement une assemblée ouverte dans laquelle se régla l’indépendance absolue du Pérou, qui fut proclamée solennellement le 28 juillet 1821. San Martin fut désigné à la fois chef du gouvernement et de l’armée avec le titre de « Protecteur du Pérou ».
Le général Andrés de Santa Cruz fraichement converti à la cause indépendantiste et libertaire de San Martin, fut envoyé à combattre aux cotés des troupes du général Antonio Jose de Sucre en aout 1823 pour aller libérer définitivement le haut Pérou.
De manière générale la situation est chaotique au Pérou, et c’est dans cette situation que le Libérateur Simon Bolivar le trouve à la fin septembre 1823.
L’indépendance n’était pas consolidée, et le 29 février 1824 les royalistes revinrent occuper Lima.
Mais cette fois les problèmes politiques qu’était en train de vivre l’Espagne (en guerre contre la France et Napoléon Bonaparte) influèrent fortement pour la défaite des troupes espagnoles en Amérique.
Bolivar trouva les espagnols divisés et organisa une armée de colombiens et de péruviens pour marcher vers le sud.
Le 6 aout 1824, il mit en déroute l’armée espagnole du général Canterac dans les campagnes de Junin. Cette victoire constitue le premier pas vers la victoire finale d’Ayacucho.
Les chefs espagnols, Canterác, Valdés et La Serna, réunis à Cuzco décident de s’organiser pour réaffronter les troupes de Sucre sous le commandement de Bolivar, et le 9 décembre 1824, les patriotes gagnent une victoire spectaculaire à Ayacucho avec la capitulation de l’Espagne et se reconnaît enfin l’indépendance du Pérou et des Amériques.
Naissance de la Bolivie
Le 9 février 1825, le Maréchal Sucre convoque toutes les provinces du haut Pérou pour se réunir en un congrès qui devait décider du destin de la nation.
Le destin de la Bolivie est alors sujet à trois possibilités au sein de l’assemblée, continuer l’union avec le Rio de la Plata, maintenir l’adhésion avec le Pérou en reconnaissant les mesures d’incorporation dictées lors de la révolution du 16 juillet 1809 à La Paz, ou que le Haut Pérou soit totalement indépendant, non seulement par rapport à l’Espagne mais aussi par rapport au Rio de la Plata et au Pérou.
L’assemblée délibérante, convoquée à nouveau à Chuquisaca (Sucre), le 10 juillet 1825 détermina par unanimité l’indépendance complète du Haut Pérou (la Bolivie), sous forme de République, par la volonté souveraine de ses enfants. Finalement le Président de l’assemblée José Mariano Serrano, avec une commission, rédigea “L’acte d’indépendance”, avec comme date symbolique le 6 aout 1825, en hommage à la bataille de Junin gagnée par Bolivar.
Par un décret a été déterminé que le nouvel Etat portera le nom de Bolivar, en hommage au Libérateur, qui en même temps est déclaré Père de la république et chef suprême de l’état.
La Bolivie naquit à la vie indépendante avec les territoires qui correspondaient à l’audience royale de Charcas de l’époque Coloniale. Cela comprenait quatre provinces converties en départements: La Paz, Chuquisaca avec comme capitale Sucre, Santa Cruz, Cochabamba, Potosi et par après se créa le département de Oruro.
Le 6 août aujourd’hui
Cette Année (2010) la Bolivie à 185 ans. Pour cette date mémorable, le Président Evo Morales a symboliquement à décidé de faire la session d’honneur et de prononcer son discours à Santa Cruz.
Dans le contexte politique actuel, avec les problèmes d’autonomisation des régions et de Santa Cruz en particulier, prononcer son discours à Santa Cruz c’est reconnaitre l’importance de cette ville, première économique du pays, et les opposants au gouvernement socialiste.
Les activités ont commencé à 6:30 avec un tir d’artillerie dans le parc Urbano. Après le traditionnel Te Deum, dans la cathédrale en hommage à l’église catholique. Ensuite, autre innovation, sur la place du 24 septembre, une messe interculturelle et interreligieuse, avec la participation des autorités des peuples originaux de Bolivie à 10 heures. Et enfin le défilé civique.
Les cruceños (habitants de Santa Cruz) ont profité de l’évènement pour réclamer qu’on remette le drapeau cruceño dans les festivités officielles et qu’on ne hisse pas la wiphala sur la place principale. La wiphala est le drapeau qui représente les communautés indiennes et paysannes et, selon certains, particulièrement celles de l’altiplano (collas) par opposition à celles des plaines (Cambas).
La veille les étudiants de la ville ont manifesté devant le palais départemental. Ils ont monté le drapeau cruceño sur la place principale en chantant l’hymne national cruceño et criant « Les principes ne se négocient pas ! »
De leur coté les paysans et indiens déclaraient vouloir défiler avec leur wiphala, qu’ils considèrent comme leur symbole.
La wiphala n’est pas encore acceptée partout en Bolivie, encore moins en orient où le racisme envers les indiens et les paysans est encore très fort. C’était encore il n’y pas si longtemps que des actes de racisme et de d’humiliation publique de masse envers les indiens ont eu lieu…
L’état plurinational de Bolivie porte bien son nom. Et nous espérons que les efforts du nouveau gouvernement pour autonomiser le pays tout en le gardant uni et fort seront récompensés.
Sources: https://www.bolivianet.com/historia/independencia.html
Journal Pagina7 du vendredi 6 aout.