Le deuxième gouvernement de Banzer se caractérisa par 4 piliers :
Opportunité: croissance économique et génération de richesse, amélioration de la qualité de l’environnement, organisation du territoire, dont le but était d’arriver à 7% de croissance du PIB (ce qui ne fut pas atteint).
Équité: développement humain, de la santé, éducation et formation professionnelle (lutte contre la pauvreté).
Institutions: institutions démocratiques, système judiciaire, décentralisation administrative, système politique et lutte contre la corruption.
Dignité: lutte contre le trafic de stupéfiant et éradication de la coca, dont le but était la suppression totale des surplus de production de coca qui avança significativement bien que dans la violence.
En décembre 1997 le gouvernement déclara la montée des hydrocarbures de 27%. Banzer revint à réclamer un accès à la mer à travers l’ONU et exigea que l’on enlève les mines anti tanques et anti personnelles à la frontière entre Bolivie et Chili. Le Chili ne fit rien de ce qu’on lui demandait et, de plus, utilisa les eaux de Silala (Potosi) sans rien payer à la Bolivie.
En mai 1998 il y eut un gros tremblement de terre à Cochabamba qui affecta Aiquile, Totoro et Mizque, de très jolis villages coloniaux. 80 personnes moururent, des centaines furent blessées et des milliers de familles se retrouvèrent sans maison.
En juillet 1999 on inaugura le gazoduque entre la Bolivie et le Brésil.
Le 7 juin 2001 mourut à Tarija l’ex-Président du MNR Victor Paz Estenssoro, l’homme le plus influent du 20ème en Bolivie. Le 27 aout mourut Juan Lechin, le plus grand chef syndical de l’histoire. Leur disparition tourna une page importante de l’histoire du pays. |
Dans sa stratégie de lutte contre la pauvreté le gouvernement établit une loi du dialogue pour créer un espace de dialogue avec les différents secteurs de la société civile. Cette mesure allait de paire avec la promesse de l’annulation d’une partie de la dette échange que l’argent soit utilisé dans le social.
Le gouvernement de Banzer éradiqua plus de 25 000 hectares de coca tout en arrêtant aussi la compensation monétaire au producteur par hectare éradiqué. Au début il fit une compensation communautaire puis plus rien. Cela eut une grosse répercussion sur l’économie du pays qui perdit entre 300 et 500 millions de dollars de revenus par an.
Conséquence à cette mesure fut le développement de la violence dans le Chapare. En tout mourut presqu'une centaine de personnes et plus de 250 furent blessées.
Détérioriation de l'image du Président
Les producteurs de coca, probablement influencés par les narcotrafiquants, furent de plus en plus agressifs, ce à quoi les forces de l’ordre répondirent par des mesures répressives concernant les blocages de route, avec une violence croissante. Les cocaleros quant à eux séquestrèrent, torturèrent et tuèrent des policiers et soldats lors d’actions de blocages. Cette politique, imposée par les États-Unis obligea le gouvernement à appliquer des actions violentes antipopulaires et renforça le leadership des cocaleros, rendant possible l’arrivée au pouvoir de leur dirigeant principal Evo Morales.
En 1998, le vice président Quiroga présenta un plan de lutte anti corruption fait avec l’aide de la coopération internationale. Des problèmes de corruption aux douanes, au sein de la police, au ministère de la santé, et du travail obligèrent le Président à destituer les ministres et haut fonctionnaires de ces secteurs. Le Président lui-même trempa dans une affaire de corruption autour de l’achat d’un avion pour la défense civile, inadéquat, trop cher et sans application pour la défense civile. On découvrit également plusieurs irrégularités dans la gestion des fonds pour les victimes du tremblement de terre de Cochabamba. Également dans la gestion économique de la préfecture de La Paz, par le neveu du Président.
L’image du Président se détériora encore avec l’affaire Diodato, époux de sa nièce accusé de trafic de stupéfiant, gestion illégale de casino et réseau illégal de téléphones portable afin d’espionnage de hauts dignitaires de l’état. Il fut condamné à 10 ans de prison mais s’échappa pour disparaître. Quelques mois après sa disparition la fiscale chargée de son cas fut assassinée.
De plus on jugea Pinochet et l’opération Condor en Europe. Ce qui rappela le dernier mandat de Banzer et tous les abus et violences qui avaient été pratiquées alors en Bolivie et détériora son image sur la plan international et européen particulièrement.
Le Vice président Quiroga avait beaucoup d’influence, ce qui ne plut pas à Banzer qui l’obligea à faire une déclaration publique de loyauté. Cela favorisa l’image de Quiroga qui se démarqua de Banzer et sa mauvaise réputation. De plus les gens n’associèrent pas Quirago avec l’échec de la politique économique dont il était principalement responsable.
La guerre de l’eau
Depuis 1952 la société bolivienne commençait à s’affirmer et à prendre conscience de la réalité des inégalités, des injustices et de l'exclusion dont certains étaient victimes. De nouveaux acteurs sociaux avec une logique culturelle et ethnique différente, dans le contexte de mouvements sociaux émergeants marquèrent ce moment d’affrontement état/société au milieu d’une violence croissante et préoccupante.
En avril 2000 il y eut un gros conflit à Cochabamba à partir d’un contrat signé entre l’état et l’entreprise Aguas del tunari (filiale de la nord américaine Betchel) cédant l’eau de la ville. Selon le journal The Ecologist en 2000, la Banque mondiale avait déclaré qu'elle ne renouvellerait pas un prêt de 25 millions de dollars US à la Bolivie si elle ne privatisait pas son service des eaux. Cette privatisation allait augmenter considérablement le prix de l’eau et produire des problèmes concernant le tunnel du projet Misicuni. Cela généra un mouvement populaire dirigé par un groupe civique dénommé « coordinatrice de l’eau » qui exigea l’annulation du contrat. Il y eut de nombreuses manifestations et blocages de routes. L’état déclara l’état de siège.
La police, menée par le major David Vargas se mutina à la Paz demandant de meilleurs salaires, ce qui affaiblit sérieusement le gouvernement. Cependant ce dernier envoya les militaires régler le problème, ce qui se termina avec un solde de plusieurs morts et des centaines de blessés.
En septembre les paysans à La Paz et les cocaleros dans le Chapare, bloquèrent violement la ligne centrale du pays, le paralysant pendant trois semaines. Les cocaleros voulaient que l’on enlève l’éradication de la coca, ce qui ne leur fut pas accordé. Sur l’altiplano, Felipe Quispe, secrétaire exécutif de la CSUTCB négocia très fermement des revendications qui furent acceptées presque dans leur totalité. 18 personnes moururent et des centaines furent blessées. Ce fut le pire moment de tout le gouvernement de Banzer, qui surpassa péniblement une crise qui renversa la situation économique et sociale générale.
Paysage politique
La force croissante et le pouvoir de mobilisation sociale des fédérations de producteurs de coca du Chapare, catapultèrent Evo Morales en tant que chef syndical et à un poste de député après son succès régional des élections de 1997. Le Mouvement vers la Socialisme (MAS) qui regroupait les secteurs marginaux de l’ancienne gauche et des groupes intellectuels critiques du modèle, se transforma en la seconde force politique du pays après les élections de 2002, où il fut à pas moins de deux points du gagnant et écrasa les scores lors des élections de 2005, obtenant pour la première fois depuis 1966 plus de 50% des votes.
Le MAS dont la force centrale était le mouvement cocalero, se converti en protagoniste critique et radicalement opposé au modèle libéral et l’aliénation de la Bolivie à un schéma de globalisation et de marché ouvert. Pour cela on utilisa la pression des rues, blocages et actions violentes. Sa racine marxiste se mélangea aux positions culturelles et la coca comme pouvoir de pression sociale.
Le succès de Manfred Reyes Villa en tant que maire de Cochabamba (1993-2000) donna lieu à la création de la Nouvelle Force Républicaine (NFR) en 1996. Son influence à Cochabamba lui permit de s’allier à l’ADN afin de se présenter aux élections de 1997.
Felipe Quispe, après avoir participé avec Garcia Linares à l’EGTK, puis être devenu leader syndical pour la CSUTCB, réa en 2000 son propre parti le Mouvement Indigène Pachacuti (MIP), avec comme objectif la valorisation d’un espace régional propre et autonome. Les blocages de septembre-octobre 2000 montrèrent sa capacité de pression et son effet politique sur le pouvoir central du gouvernement. Il obtînt un grand appui électoral à La Paz qui lui permit d’être la cinquième force parlementaire du pays en 2002. En 2005, il fut démis à cause de la perte des votes indigènes que le MAS lui pris.
En été 2001 Banzer atteint d’un cancer renonça à sa charge de Président. Le 6 aout il prononça un discours dans la Maison de la Liberté à Sucre, dans lequel il ne montra aucun regret pour les violations des droits de l’homme commis lors de son premier mandat et remit la présidence à Jorge Quiroga qui termina le mandat. Retraité à Santa Cruz, Banzer mourut le 5 mai 2002.
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Source:
José de Mesa, Teresa Gisbert, Carlos D. Mesa Gisbert : HISTORIA DE BOLIVIA; 7ème édition, Editorial Gisbert, La Paz, 2008