Tupac Amaru II

José Gabriel Condorcanqui Noguera, plus connu sous le nom de Tupac Amaru II,  fut un leader politique qui lança la plus grande rébellion indigène et anti coloniale du 18ème siècle.

Il nait dans le village de Tungasuca (évêché de Cuzco), vers 1740. Fils de caciques, il est instruit par des curés. Plus tard il va au collège de San Francisco de Borja de Cuzco, dirigé par les jésuites puis à Lima.
C'était un homme instruit, d'une grande culture qui parlait parfaitement castillan et pouvait facilement lire le latin. Il reçut d'Espagne le titre de marquis d'Oropesa.  Il était petit et mince et s'habillait luxueusement selon son rang et à la manière espagnole. Par après il fut excommunié et porta les habits incas. 

Il dirigea le plus grand mouvement indigène indépendantiste de la Vice royauté du Pérou. Il fut le premier à demander la liberté de toute l'Amérique, impliquant la séparation politique mais aussi l'élimination de toutes les formes d'exploitation des indiens et des corregimientos, des barrages et des douanes. Il fut aussi le premier à décréter l'abolition de l'esclavage (le 16 novembre 1780).

Premiers soulèvements (1780)

Tupac Amaru II hérita de son père le titre de cacique et fut un grand homme d'affaire. Son commerce prospère lui valu maintes pressions des espagnols qui voulaient le monopole sur le transite des minéraux dans le haut Pérou.
Par ailleurs il subissait la situation typique des curacas, devant faire la médiation entre le gouverneur et les indiens, obligeant ces derniers à se soumettre tout en désirant les aider contre tant d'abus. 

En 1780 tout le Pérou et le haut Pérou se rebellent. La cause principale de cette rébellion fut l'imposition de ce nouvel impôt par la couronne. Tupac Amaru suit la révolte avec comme cri de guerre "vive le roi et que meurt le mauvais gouvernement".

C'est à la Paz que la révolte fut la plus subversive; à minuit le 12 mars 1780 toute les églises sonnèrent pour rassembler les hommes. Les révoltés ne purent trouver les autorités de la ville, ce qui leur sauva la vie. Cette fois les révolutionnaires remettaient le pouvoir du roi en question en criant "Vive la loi de Dieu et la pureté de Marie et que meurt le roi d'Espagne et se termine le Pérou, qui est cause de tant d'inquiétudes..." En plus du mécontentement envers les autorités qui voulaient faire payer un nouvel impôt, les gens en voulaient au curés qui en plus de donner le mauvais exemple, abusaient des indiennes, et exigeaient des contributions contre toute loi et justice. Ces abus étaient dénoncés par d'autres prêtres qui compatissait à la cause des indiens et, sur le terrain, ils participèrent directement au soulèvement et, pour cette raison, furent arrêtés et renvoyés en Espagne. 

José Gabriel Condorcanqui ou Tupac Amaru II, descendant de Tupac Amaru (le dernier Inca assassiné par le vice roi de Tolède), décida de rétablir l'empire inca. Non pas dans le but de remettre un empire autoritaire, mais de restituer l'autorité indigène. Il ne s'agissait pas d'une revendication contre tout ce qui était blanc car il incluait les créoles et les métisses, contrairement aux indiens. De fait, Tupac Amaru réunit les indiens, les créoles, les métisses et les esclaves sous un front anticolonial, mais il ne pût éviter que le mouvement se transforme en une action raciste contre les espagnols et les créoles. 

Cette rébellion qui enflamma tout le pays se mit en place en dix ans, lors desquels les caciques de quasi tout le Pérou se coordonnèrent. Avant de se soulever, Tupac Amaru eut recours à tous les moyens légaux possibles. Il envoya un de ses frères en Espagne pour exposer les plaintes des indiens aux rois et demander une solution, sans succès. Il voulait le retour des terres aux indiens et supprimer totalement la mita. Il demanda également que l'on respecte la hiérarchie des caciques, qu'ils puissent se gouverner eux-mêmes et qu'on le reconnaisse comme descendant légitime des incas.

Les soulèvements récents de La Paz, Cuzco, Arequipa, Cochabamba et de la capitale de l'audience avaient créé un climat propice au soulèvement, l'Espagne alors en guerre contre l'Angleterre et les vice-rois occupés à sécuriser les côtes du nouveau continent, ainsi que les évènements qui allaient avoir lieu à Chayanta poussèrent Tupac Amaru à déclarer la guerre à tous les espagnols péninsulaires. 

Déclaration

Tupac Amaru et Antonio Arriaga, gouverneur de la province de Tinta, se réunirent dans la maison du curé Carlos Rodriguez pour célébrer le jour du roi. Tupac Amaru, au retour du repas en profita pour kidnapper le gouverneur et lui faire signer un ordre pour donner aux révoltés tous les fonds disponibles. Après avoir récolté toutes les armes et l'argent, le gouverneur fut pendu sur la place publique du village. 
Les espagnols apprirent la nouvelle 8 jours après et envoyèrent directement une expédition. Lors de la rencontre avec les rebelles les troupes royales se réfugièrent dans un temple que Tupac Amaru fit voler en éclats. Des 604 soldats des troupes royales seulement 28 survécurent. Sur ce Tupac Amaru fut excommunié par l'évêque de Cuzco. 

Siège de Cuzco

Tupac Amaru se mit en marche pour Cuzco, recrutant dans les villages des indiens et soldats pour assiéger la ville. Ils intimèrent Cuzco à se rendre, ce que cette dernière refusa. Ils lui déclarèrent donc la guerre en janvier 1781. Mais ils furent contrains de se retirer. Alors que Tupac Amaru retournait à Tinta avec son armée de 60 000 indiens. Le visiteur Areche lui fit de la contre propagande en déclarant qu'il avait des ordres de la couronne pour annuler les corregimientos et les dettes qui allaient avec, annuler les droits de douane et pardonner aux rebelles, sauf aux chefs. 

Les troupes royales avec 17 000 hommes dont 80% d'indiens vinrent attaquer le cacique à Tinta et dérouta les rebelles. Tupac Amaru fut condamné à mort. Le 18 mai 1781, il fut trainé jusqu'à la place principale de Cuzco où il dut assister au supplice de sa femme et de ses enfants, puis on lui coupa la langue avant d'essayer de l'écarteler, sans succès. Il fut donc décapité et démembré. Sa tête et ses membres furent exposés dans les principaux foyers de rébellion.

Cependant cela ne suffit pas à étouffer la rébellion, son cousin survivant continua la lutte.  

Tomas Catari et Chayanta

Le plus grand foyer de mécontentement fut à Chayanta où le cacique Tomas Catari était dans le même camp que Tupac Amaru.
Chayanta est une ville proche de Potosi où se prenait beaucoup de mitayers pour aller travailler dans les mines. 
Tomas Catari est un cacique dont le titre est les droits furent usurpés par un faux cacique. Il réclame ses droits et est arrêté par les autorités. Il réussit à fuir et marche plus de 3000 km jusqu'à Buenos Aire où il va réclamer ses droits, où il arrive fin 1778. Mais l'inspection du cas et les lenteurs bureaucratiques désespèrent le cacique qui retourne à Chayanta. Il s'autodétermine cacique et commence sa lutte contre le cacique imposé par le gouverneur. Il est une deuxième fois arrêté.

Suite à l'arrestation de Catari les indiens menacent le gouverneur et celui-ci promet de relâcher Catari. Mais au lieu de cela il revient avec des soldats dans l'intention de prendre des mitayers et sans aucune intention de relâcher Catari. Les indiens lui déclarent alors la guerre. Ils remportent la bataille grâce à leur supériorité numérique et font prisonnier le gouverneur. L'audience, pour sauver le gouverneur relâche Catari et confirme son titre de Cacique. Le gouverneur fut remplacé par un autre tout aussi mauvais. L'affaire n'était pas réglée et Catari continue à écrire à Amaru pour qu'ils lancent la révolution. 

Les indiens attendaient le soulèvement de Tupac Amaru pour agir ensemble, mais la situation de Chayanta était insoutenable ainsi qu’ils furent obligés de lancer la révolte...

Alors que Catari parcourait les terres pour recevoir le tribut royal, un espagnol commandé par l'ancien gouverneur l'attrapa et l'emmena à La Plata. Sur le chemin une multitude d'indiens vinrent sauver leur chef mais à la vue de cette masse, Catari fut exécuté le 15 janvier 1781. Les indiens attaquèrent et tuèrent l'espagnol. Au même moment Tupac Amaru lança la révolution et les indiens suivirent de plus belle, sans pitié.

Tupac Catari et le siège de la Paz

Julian Apaza, dit Tupac Catari, en l'honneur des deux précédents héros, fut un cacique qui dirigea le plus grand évènement de la rébellion indigène; le siège de la Paz. 

Début mars 1781, la rébellion de Tupac Catari avait déjà entre ses mains les provinces de Sica Sica, Carangas, Pacajes, Yungas, Omasuyo et Chucuito. Ensuite il s'attaqua au siège de la Paz à la tête de 40 000 hommes. Le premier siège dure 109 jours et tua 10 000 espagnols. Les espagnols envoyèrent des métisses espions qui simulèrent une sympathie envers la cause de Catari et enseignèrent aux indiens à utiliser les armes espagnoles. Mais par après ils trahirent les chefs indiens et les remirent aux mains des espagnols. Pour se venger Catari attrapa un métisse espion, lui coupa les deux bras et l'envoya aux espagnols avec une lettre. 

Le président de l'audience envoya une armée pour soutenir les assiégés qui furent renforcés de 80 soldats vétérans et de vivres. Mais les vices royautés de Lima et de Buenos Aire envoyèrent des troupes. Dans la bataille fut attrapée Bartolina Sisa, femme de Tupac Catari. Les espagnols appelèrent Catari à se rendre, mais il ne leur fit pas confiance, sachant que de toute façon ils ne libéreraient pas sa femme. Plus tard il sera trahi par Tómas Inca Lupe qui le livra aux espagnols. 

Tupac Catari fut écartelé sur la place publique du village de Peñas et sa tête envoyée à la Paz, tandis que sa femme fut pendue le 5 septembre 1782. Aujourd'hui le 5 septembre est le jour international de la femme indienne en hommage à Bartolina. 

Les frères de Tomas Catari continuèrent l'oeuvre de leur frère à Chayanta  à la tête de 7000 hommes. Mais ils furent vaincus...

Sébastian Pagador et la rébellion d'Oruro

À Oruro la rébellion prit un autre tour, car les métisses et les créoles étant exclus des privilèges des espagnols, se joignirent à l'attaque. Le 10 février 1781, sous le cri de Sébastian Pagador, la guerre fut déclarée à tous les espagnols de la ville et tous ceux qui furent trouvés furent tués. Leurs maisons furent saccagées et brulées. 

Cependant les métisses et les créoles qui avaient aussi des possessions se virent contraints de laisser leurs terres en propriété commune en échange de la paix. Sébastien Pagador fut tué par les indiens lors d'un pillage.

Luis Lasso et la rébellion de Tupiza

Le métisse Lasso de La Vega se souleva en Mars 1781 et tua le gouverneur de la ville. Il prit le pouvoir au nom de Tupac Amaru. Mais en peu de temps cette rébellion fut matée par les royalistes et Lasso fut pendu.

Conclusions 

La rébellion de Tupac Amaru enflamma tout le pays, se fut la première et la plus grande rébellion d'une grande valeur symbolique.

Encore aujourd'hui, le Président Évo Morales, utilise cette image à laquelle il s'associe, comme défendeur de la cause indienne contre les impérialismes (néo)colonisateurs.

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Source: 

José de Mesa, Teresa Gisbert, Carlos D. Mesa Gisbert : HISTORIA DE BOLIVIA; 4ème édition, Editorial Gisbert, La Paz, 2001