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La révolution de 1952
     
 

En 1950 70,5% de la population bolivienne se dédiait à l’agriculture, 63% était indienne et 66% était rurale.  Malgré les revendications et soulèvements des indiens, à partir de la création de syndicats et de la mobilisation de 1945, l’agriculture, qui concernait alors seulement 2% des terres cultivables du pays, était aux mains de grands propriétaires foncier qui contrôlaient la production. Celle-ci ne suffisait pas à sustenter la Bolivie dont 20% des aliments – dont beaucoup originaires de l’altiplano – s’importaient.

Le secteur minier était gouverné par trois grandes familles (les barons de l’étain), l’état ne touchait qu’une infime partie de ces trois grandes fortunes et était en même temps dépendent d’elles. D’un autre coté ce secteur était en déclin; on n’avait pas fait les investissements nécessaires à la modernisation des mines et les coûts de production rendaient le pays peu compétitif.

La brèche entre les grands propriétaires et industriels et les paysans et mineurs, était énorme et la classe bourgeoise et moyenne était alors quasi inexistante.

La révolution de 1952

On peut parler d’une vraie révolution car celle-ci changea radicalement la face de la Bolivie ; la minuscule classe dominante et dirigeante fut remplacée par une classe moyenne qui affecta profondément l’élite en l’expropriant des mines et des terres.  De plus l’émergence des paysans, ouvriers, mineurs et travailleurs, à travers des organisations puissantes, changea radicalement les rapports de force.

D’autre part la structure économique changea totalement ; on passa d’une économie semi féodale contrôlée et dépendante de capitaux privés, à une économie contrôlée en grande partie par l’état (70%). Apparait une bourgeoisie qui se dédie à l’industrie, l’intermédiation financière et les exportations. Le pays atteint une certaine diversification de la production économique et une meilleure articulation du territoire géographique. Le développement spectaculaire de l’orient est aussi le résultat de la révolution.

La réforme agraire lancée dès 1953, élimina les grandes propriétés rurales, initia un processus d’intégration des paysans dans la classe active du pays et changea les rapports de force entre les classes sociales de la campagne.

Au niveau politique on instaura le vote universel, ce qui changea complètement la donne.

Les ouvriers et les mineurs eurent accès à une participation directe dans les décisions économiques et politiques du pays. Et on créa une importante législation du travail et de nouvelles lois sociales.

Au niveau culturel il y eut également un boom avec l’émergence du mouvement indigène et nationaliste. Construire un état national fort allait de pair avec la mise en place d’une culture unificatrice, métisse et castillane, bien que cette idée changea petit à petit avec l’idée de l’accès des secteurs aymaras et quechua aux décisions et de respect de la diversité.

Malheureusement ces grandes idées seront limitées par la corruption, et l’influence négative de certaines personnes ambitieuses.

Après 6 ans d’exil, Paz Estenssoro, chef du MNR revient à la Paz le 15 avril 1952, attendu par des foules optimistes. Le MNR s’était engagé à gouverner en collaboration avec la COB (centrale ouvrière bolivienne) dont le leader était Juan Lechín Oquendo. Le pouvoir syndical au sein du gouvernement allait donc être très grand.

Víctor Paz Estenssoro (1907-2001)

Víctor Paz Estenssoro est la figure politique la plus importante du 20ème siècle en Bolivie. Il eut un rôle très important dans les transformations radicales que vécut le pays en 1952 et 1985.

Né à Tarija le 2 octobre 1907, il fit ses études à Tarija et Oruro et devint avocat à la Paz en 1927. Il commença sa carrière comme assistant au service National des Statistiques et en 1929, il était déjà rédacteur de la chambre des députés. Dans la guerre du Chaco il fut intervenant général de l’inspection des finances du premier corps de l’armée (1932) et il se battit également sur le front.  En 1937 il devint avocat de Patiño et démissionna un an après. Il fut ensuite élu député de Tarija.

Entre 1938 et 39, il fut président de la banque des mines et professeur d’histoire des doctrines économiques à l’université de la Paz. En 1940 et 1943, son travail parlementaire le consacra un des meilleurs députés du congrès national. Il se battit fortement contre le gouvernement de Peñaranda.

En 1941 il fonda le MNR, parti dont il sera chef pendant 50 ans.

Il fut ministre de l’économie et des Hacienda et statistiques. Il fut également un des plus grands piliers et gestionnaire du gouvernement de Villaroel. À la chute de celui-ci il s’exila à Buenos Aires (1946-1952).

Il fut quatre fois Président de Bolivie ; en 1952, 1960, 1964 et 1985, en tout il gouverna la Bolivie 12 ans et 6 mois ! Entre 1956 et 1958 il fut ambassadeur de Bolivie en Angleterre. Exilé entre 1964 et 1971, il revint en 1971 pour collaborer avec le gouvernement de Banzer, en 1974 il fut à nouveau exilé. En 1990 il se retira du poste de chef du MNR et se retraita définitivement. Il meurt le 7 juin 2001. 

Les principales mesures du nouveau gouvernement furent; la nationalisation des mines, la réforme agraire, le vote universel, et la réforme éducative.

Une des premières mesure du nouveau gouvernement fut aussi de rénover toute l'armée, certains pensent que cela aboutira sur le coup d'état qui le fera tomber en 1964.

En 1954 on termina la route Santa Cruz – Cochabamba, qui permit de développer Santa Cruz et de l’intégrer au reste du pays. On fit aussi d’autres routes moins importantes, inaugura les chemins de fer de Corumba-Santa Cruz et Santa Cruz-Yacuibe. On améliora les aéroports, augmentant les destinations internationales de la Lloyd Aéreo Boliviano (LAB).

Durant le premier gouvernement de Paz, il y eut deux tentatives de coup d’état. Avec l’argument que les mesures prises affectaient d’influents secteurs du pays et de grands intérêts, le parti n’eut pas de pitié pour les partis de l’opposition, particulièrement pour la Phalange Socialiste Bolivienne

Répression politique

Le gouvernement opta pour des méthodes violentes et répressives qui garanti la dictature du parti. Le 23 octobre 1952 on établit des prisons sous administration militaire à Corocoro, Uncia, Catavi et Curahuara de Carangas. On y enfermait les opposants du gouvernement qui y étaint humiliés et torturés sans vergogne.

On justifia ces violences en argumentant que l’on pratiquait une violence révolutionnaire et anti-oligarchie pour soutenir la stabilité de la révolution. Les intransigeances et les abus devinrent monnaie courante, aiguisant une pratique qui fut commune dans le passé (par exemple Hertzog et Urriolagoita utilisèrent l’île de Coati sur le Lac Titicaca comme prison). La période la plus dure de la répression fut sous le gouvernement de Federico Fortún.

Le MNR avait pour ennemi juré le FSB (parti Phalanges Socialistes bolivien). Plusieurs fois ce dernier essaya de le faire tomber. Le 19 avril 1959 le FSB organisa un complot. Mais l’essai de prise du régiment de la garde présidentielle Ballivian Waldo se termina par la mort de presque tous les leaders du parti. Les corps de Óscar Únzaga de la Vega (chef du parti) et de René Gallardo, son assistant, furent retrouvés dans la maison du 188 rue larecaja à la Paz. Bien que la version officielle prône le suicide, les partisans du parti accusent le meurtre.

Le MNR fut aussi accusé des faits de Terebinto à Santa Cruz, en mai 1959 où furent assassinées quatre jeunes personnes.

Le 17 juin 1956 on réalisa les élections générales convoquées par l’État. Ce fut les premières élections universelles du pays; de 204 000 électeurs en 1951 on passa à 1 119 000 électeurs en 56. Il y eut quatre candidats mais ce fut le MNR avec Hernán Siles Zuazo qui remporta haut la main les élections.

Sous cette administration on approuva le code de Sécurité Sociale de Bolivie, une des législations les plus avancée et bénéfique pour les travailleurs qui dans la pratique fut peut efficiente. Mais le principe de sécurité sociale universelle et solidaire et l’approbation du code furent un grand pas en avant. On approuva aussi la loi des Coopératives.

Stabilité monétaire et rupture avec la COB

Le premier gouvernement, en produisant de grand changement, avait également produit une grande inflation monétaire. Entre 1954 et 1956 l’inflation annuelle était de plus de 900%! Cette inflation mécontentait les gens et commençait à monter la population contre le gouvernement. Hernán Siles Zuazo, Président de la deuxième gestion du MNR, dicta le 15 décembre 1956, un décret de stabilisation monétaire conçu avec le FMI et les États-Unis. Ce décret prétendait stabiliser le Boliviano à 7.7 dollars, enlever la subvention des produits de première nécessité, éliminer le contrôle des importations et exportations et supprimer le change multiple. 

De suite des manifestations furent organisées, la COB s’affronta directement avec le gouvernement. Cela  mena à la fin de la co-gestion du gouvernement et de la COB. Le second congrès de la COB, malgré les efforts de Lechín, censura le nouveau plan et appela à la grève. Le MNR commença aussi à se diviser entre droite et gauche.

Le Président se déclara en grève de la faim pour défendre le plan de stabilisation. Cela eut un fort impact sur la grève ouvrière; elle fracassa. Une COB pro gouvernement (COB de l’unité Révolutionnaire) parallèle à la COB se créa, mais ne vécut pas longtemps.

Finalement le vice-président Ñuflo Chavez Ortiz démissionna en signe de protestation, il pensa que cela allait arrêter le plan et renforcer la gauche et sa figure. Mais Siles accepta sa démission et appliqua le plan.

Déclin et chute du MNR

Lors des élections de 1960, le MNR fut réélu avec à sa tête Paz et Lechin. Les partis de l’opposition et particulièrement Guevarra, ancien fondateur et partisant du MNR qui s’était séparé du MNR pour créer le PRA (Parti Révolutionnaire Authentique), s’écrièrent qu’il y avait eut fraude. Mais Paz et Lechin prirent la tête du pays le 6 aout 1960.

Le troisième gouvernement du MRN entrait dans une nouvelle ère; une étape de consolidation et de relancement du développement. C'était le moment d’insérer la Bolivie dans l’économie mondiale à travers des investissements externes et la génération de grandes épargnes internes.

On suivit le plan de stabilisation de 1956 et, en 1962, on créa le peso bolivien qui valait alors 12 peso pour un dollar. La stabilisation fut telle qu’il n’y eut pas de variation monétaire jusqu’en 1972, soit 16 ans.

Du point de vue social on continua sur les politiques antérieures; la participation ouvrière diminua jusqu’à s’opposer au MRN en 1963. On augmenta les mesures de sécurité sociale en faveur des employés et travailleurs. On lança avec CONAVI les logements sociaux, et les mutuelles d’épargne et de prêt.

Cependant les grèves, que Lechin lui-même critiqua, continuèrent. Dans la campagne il y eut de fréquents affrontements entre paysans.

L’armée recommença a être un facteur important de décision. Depuis son démantèlement en 1952, petit à petit, elle se réorganisa et, à travers la « Cellule militaire » du MNR se profilèrent des figures politiques telles que le Général Ovando Candia des forces armées et le général René Bariento Ortuño des forces aériennes.

En 1961 le congrès approuva la 14ème constitution du pays. Cette constitution, dont la légalité fut contestée à cause de fait qu’elle fut votée par le congrès et non pas l’assemblée générale, reconnaissait les avancées de la révolution. Parmi celle-ci le vote universel, la nationalisation des mines reconnues comme patrimoine d’état, la réélection présidentielle, la définition des relations état-église, la légalisation des milices populaires et la détermination de la validité du travail comme titre de propriété dans la campagne. La réélection Présidentielle fut le point le plus contesté de cette constitution et le facteur qui appuiera incontestablement la chute du MRN. 

Plans économiques

On créa le ministère de Planification et Coordination, dont le premier ministre fut le Dr. Roberto Jordán Pando. Le « Plan décennal » proposait un développement cohérent et planifié à long terme.

Le plan économique du MNR fut un des instruments les plus importants de diagnostic et planification de l’économie bolivienne.  Le plan de Jordán suivit celui de Bohan et le plan de Guevara en 1955, répondant aux défis de croissance intégrale et diversifiant l’économie.

COMIBOL, l’entreprise minière de l’état, déclinait à cause de la haute bureaucratie, la mauvaise gestion, la basse productivité et les coûts élevés de production. En 1961, pour la relever on mit en place le Plan Triangulaire. Un plan qui comptait sur l’aide des États-Unis, du BID et de l’Allemagne fédérale. Jusqu’en 1964 on avait financé 27 millions de dollars dans la diversification de la production, projets d’exploration de nouveaux gisements et de rationalisation administrative. Mais ce plan eut peu de succès.

Rupture des relations avec le Chili

En avril 1962, les relations de la Bolivie et du Chili se rompirent à cause du fait que le Chili déviait les eaux du fleuve Lauca dans son propre intérêt et passant outre les intérêts et le droits de la Bolivie. Cette rupture réaffirmait également la revendication permanente de la mer. Les relations resteront interrompues jusqu’en 1975 où le général Banzer essayera, encore une fois, de récupérer vainement la mer.

L’aide des États-Unis

L’existence même de la Révolution nécessitait sa reconnaissance internationale et tout d’abord occidentale. La nationalisation des mines créa une grande susceptibilité à Washington et rajouta à la difficulté du MNR de prouver, en 1943, qu’il n’était pas un parti pronazi.

Après la révolution il dut prouver, au contraire, qu’il n’était pas procommuniste. Les boliviens durent travailler durement pour garder des liens avec les États-Unis qui leur permettait de vendre leur production, arranger l’indemnisation des barons de l’étain suite à la nationalisation des mines, et finalement recevoir une aide économique qui devint prépondérante et rendit la Bolivie peu à peu dépendante des États-Unis. L’aide économique des États-Unis permit à cette dernière de garder une main sur le pays et le rendit dépendant du modèle américain.

En 1961 le président Kennedy, mit en place l’Alliance pour le Progrès, qui avait plusieurs programmes en Bolivie, mais ce projet n'eut pas le temps de voir le jour.

Élections de 1964 et coup d'état militaire

En 1964, lors des nouvelles élections Paz se présenta à nouveau. Cette obsession de rester au pouvoir lui valu la création d’une forte opposition et sa chute.

Le MNR se divisa encore plus. En 1963, Lechin et Chávez créèrent le Parti Révolutionnaire National de Gauche (PRIN).

Paz se présenta pour le MNR avec Federico Fortún comme second, cependant la pression fut telle qu’il dut nommer René Barientos, chef de la « Cellule militaire » à la place de Fortún et reconnaître l’influence croissante de l’armée dans la politique du pays. Finalement Paz est élu alors que le parti est complètement divisé et loin de ses idéaux d’origine.

L’armé décide de revenir au pouvoir à travers un coup d’état. Barrientos, alors vice-président et Ovando, Commandant des Forces Armées, lancèrent le coup d’état à peine trois mois après la possession de Paz. Ils furent appuyés par les opposants au gouvernement (Siles, Lechin et Guevarra) qui déstabilisèrent les membres du MNR de l'intérieur. Il y eut des affrontements à La Paz et à Oruro mais la résistance fut courte. Le MNR avait beaucoup d’ennemis et Paz dut s’enfuir en exil le 4 novembre 1964.

Les 12 années du MRN eurent une grande influence sur le développement du pays. Cependant le haut niveau de corruption, la mauvaise gestion et les ambitions personnelles ont empêché la plénitude et le renforcement du processus de libéralisation économique et le progrès social prôné par le parti révolutionnaire.

Cette révolution a donné naissance à une Bolivie complétement nouvelle, l’insérant dans le monde moderne. Plus de 50% de la population fut intégrée à la vie économique du pays à travers la propriété de la terre et à la vie politique à travers le droit de vote.

Ce que la révolution ne put faire c’est consolider une bourgeoisie nationale qui accomplisse son rôle historique. Il ne put pas non plus développer une infrastructure industrielle minime qui aurait mis la Bolivie à un niveau de compétitivité avec les pays relativement développés, comme la Paraguay, l’Équateur ou le Pérou. Cela sera pour beaucoup dans la détérioration de l’économie bolivienne des années 80. 

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Source: 

José de Mesa, Teresa Gisbert, Carlos D. Mesa Gisbert : HISTORIA DE BOLIVIA; 4ème édition, Editorial Gisbert, La Paz, 2001

 
   
   
 

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